Toi, moi et kimi

Juin 2, 2023

Le Moine de bar était récemment à Tokyo pour aller acheter le dernier Murakami mais pas que… Mais bon, nous remettrons la discussion du « pas que » à plus tard même si nous avons eu le plaisir de deux entretiens de grande qualité sur le manga.

Revenons à nos moutons sauvages. On se souvient peut-être de ce dialogue épique entre Murakami, écrivain et traducteur, et Motoyuki Shibata, professeur d’université et traducteur, sur la bonne façon, boku ou watashi, de traduire le I (je) des héros masculins de Chandler.

Cela nous avait donné un article passionnant : « La traduction est chose vraiment étrange », dans le numéro 12 en 2017 de la revue Monkey, éditée précisément par Shibata.

 Monkey n°12

Cet article sera d’ailleurs repris dans un livre de Murakami et Shibata en 2019 : Parlons de ce qu’est vraiment la traduction ou De quoi parlons-nous lorsque nous parlons de traduction (Éditions Switch Publishing, version de poche Shinchōsha) 

Parlons de ce qu’est vraiment la traduction (édition de poche 2021).

Alors évidemment, le Moine de bar avait cela en mémoire quand il ouvrit enfin le nouvel opus de Murakami dans un train de la Yamanote de retour d’Ikebukuro et de l’immense librairie Junkudo et ses caisses automatiques.

Pour le Moine de bar, le Yaesu book center (1978-2023) près de la gare de Tokyo était plus proche, et plus riche de souvenirs avec son café en demi-étage, mais il a fermé en mars pour une reconstruction et une réouverture en 2028.

Toujours est-il que le moine de bar s’arrêta dès la premiere colonne (le texte japonais est vertical…)

Kimi ga boku ni...

きみがぼくにその街を教えてくれた。Kimi ga boku ni sono machi wo oshiete kureta.

Et le Moine de bar ne put s’empêcher de penser que Murakami l’avait fait exprès.

Exprès d’écrire une phrase intraduisible.

Car dans le « C’est toi qui m’avait indiqué ce quartier. » (traduction fort malhabile et médiocre) on perd le fait que Kimi est forcément (aurait dit Duras) une jeune femme, Boku nécessairement un jeune homme, et qu’il y a entre Kimi et Boku un sentiment d’amour partagé, voire des échanges charnels. Toutes nuances que ni « toi » ni « m' » ne peuvent transmettre.

J’imagine assez que cet incipit sera un jour dans tous les cours et manuels de traduction du japonais…

Longtemps, toi et moi…

Le voyage à Tokyo vaut toujours la peine…

Auteur

Le moine de bar a passé plus de la moitié de sa vie en Asie. Il est dorénavant éditeur-fondateur, et parfois traducteur, d'Atelier Akatombo.

Coordonnées

info@blogakatombo.com
(日本語、English)

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