Saké da!
Hier, un fameux guide gastronomique distribuait ses étoiles françaises. Tout cela est assez loin de Shinjuku, mais nous voudrions féliciter François Lhermitte qui a reçu le prix du meilleur sommelier.
Junmai daiginjo de la brasserie Akashi
Le moine de bar en profitera pour citer un extrait de L’Œil du chien enragé de Yūko Yuzuki
» Elle manœuvra en marche arrière et sortit du parking. Dès que la voiture eut disparu de leur champ de vision, Karatsu leva la bouteille qu’il avait à la main.
— Du saké Hakukō. Celui de Kurehara. Ça te rappelle des souvenirs, non ? Avec ce saké et tes petites truites ayu, on va vraiment manquer de rien ce soir !
Karatsu ne changeait pas. Il prenait les décisions d’autorité, les autres n’avaient qu’à suivre.
Hioka n’eut pas plus tôt posé sur la table une assiette de truites grillées au charbon de bois que Karatsu se précipita. Il enfourna un morceau et prit une expression pénétrée.
— Qu’est-ce que c’est bon. Le poisson sauvage, c’est quand même autre chose, hein ? Et ce sel, quel délice ! D’où vient-il ?
Avec ses baguettes, il allait jusqu’à récupérer les grains sur la queue des poissons.
— Le sel aussi, on me l’a offert. C’est de Suzu à ce qu’on m’a dit. De la préfecture d’Ishikawa. C’est une sorte de sel gris, réputé pour être moelleux. Tenez, goûtez ça aussi, je l’ai préparé avec ce sel.
Hioka proposait des concombres préparés en saumure.
— Un délice ! Je ne savais pas que tu étais bon cuisinier. Tu es prêt pour te transformer en parfaite petite femme au foyer !
Le saké rendait Karatsu blagueur. Hioka décida de ne pas s’en formaliser. »
L’Œil du chien enragé de Yūko Yuzuki chez Atelier Akatombo
Traduction de Mai Beck et Stéphane de Torquat
Mais ce qu’il y a de bien dans le saké, c’est que non seulement il rend blagueur mais aussi parfois le nom nous fait sourire. Parmi ceux qui sont renommés, un des préférés du moine de bar est le Nanbu Bijin.
南部美人 Nanbu Bijin
Nanbu Bijin, c’est littéralement La (ou les…) Belle Fille du Sud, mais le moine de bar vous assure que son choix repose exclusivement sur des critères gastronomiquement corrects…
Le moine de bar se souvient à ce propos d’une des premières phases de japonais qu’il a comprise – après un mois de cours – dans un vieux film de Zatoichi, lorsque le héros s’assoit dans une auberge et s’exclame « sake da« , une façon assez sommaire de commander « du saké ».
Le lendemain une professeure un peu embarrassée lui expliquait que oui, parfois, on ne disait pas toujours « nihonshu no O-tokkuri ippon onegaishimasu » (veuillez s’il vous plait m’apporter une fiole de votre délicieux alcool japonais) comme écrit dans le livre mais juste « sake da« . Sa vitesse d’apprentissage fit un bond remarquable…en suivant l’exemple de l’excellent mangaka Keiichi Tanaka
Sake da !! Sake motte koi !! Du saké !! Qu’on m’apporte du saké !!
Il est difficile dépendant de parler du saké sans parler de ses effets… et comme chez Beaumarchais, à Shinjuku aussi tout finit par des chansons. Il y en a de fort célèbres : Sake Yo! (Vive le saké) ou Otoko no komuriuta (La Berceuses des hommes), mais parfois écouter de l’enka, qui est au Japon ce que le fado est au Portugal fait parfois boire plus de que de raison, et le moine de bar vous propose plutôt un clip sorti l’an dernier par le groupe Japanese Folk Metal, intitulé sobrement Saké…
Après ça, votre « Sake da » devrait être au point…Notons bien quand même qu’il s’agit de ramasser soigneusement les canettes à la fin…